Intégrer l’activité physique au quotidien
Heike A. Bischoff-Ferrari étudie les moyens de prolonger la durée de vie en bonne santé. Son principal message: Il n’est jamais trop tard pour commencer à adopter un mode de vie sain.
Karin Meier
Madame Bischoff-Ferrari, comment ralentir le vieillissement biologique?
Nous savons aujourd’hui que seuls 30 % de notre durée de vie sont déterminés par nos gènes. C’est une bonne nouvelle, car le reste, soit 70 %, dépend de facteurs dits épigénétiques. Il s’agit principalement de facteurs liés au mode de vie, tels qu’une alimentation saine, l’exercice physique, un sommeil suffisant, des interactions sociales positives et une bonne santé mentale. Ces facteurs peuvent ralentir le vieillissement biologique et réduire les risques de maladie. De plus, nous savons aujourd’hui que même en présence de risques génétiques, la survenue de la maladie est également influencée de manière significative par des facteurs liés au mode de vie. Cela vaut donc la peine d’adopter un mode de vie sain et d’en profiter!
Quand faut-il commencer au plus tard?
L’idéal est d’apprendre un mode de vie sain dès l’enfance. Néanmoins, il n’est jamais trop tard pour commencer. Cela devient particulièrement important à un âge mur et à partir de 70 ans. L’âge de la retraite est un facteur important, car le risque de maladies liées à l’âge augmente, telles que les maladies cardiovasculaires, les cancers, le diabète et la démence. Mais même à 80 ans et plus, la fragilité peut être réduite ou évitée grâce à des facteurs de mode de vie sains.
Comment, quoi et à quelle fréquence s’entraîner?
L’activité physique devrait faire partie de notre vie. Pas besoin de survêtement pour cela. Marcher quotidiennement (6000 à 8000 pas) présente déjà d’énormes avantages pour la prévention de nombreuses maladies liées à l’âge. En outre, il est recommandé de pratiquer quotidiennement des exercices de musculation et d’équilibre. Au quotidien, il est conseillé de monter les escaliers, de se brosser les dents ou d’attendre le café en se tenant sur une jambe, ou encore de faire de la gymnastique ou du yoga léger. Un nouveau concept sont les «snacks de mouvement». La position assise est alors interrompue par un exercice physique ou trois minutes de danse ou de «gruuve», un programme d’activité physique accompagné de musique (gruuve.ch).
Portrait
Heike A. Bischoff-Ferrari est médecin-chef du service universitaire de médecine gériatrique à l’hôpital municipal de Zurich Waid, et directrice de la clinique de médecine gériatrique à l’hôpital universitaire de Zurich. Elle est également titulaire de la chaire de gériatrie et de recherche sur le vieillissement de l’université de Zurich, directrice du centre de recherche sur l’âge et la mobilité et directrice d’étude de la plus grande étude sur le vieillissement en Europe, DO-HEALTH.
Quel est le rôle du poids et de l’alimentation?
Le surpoids et une mauvaise alimentation favorisent une réaction inflammatoire chronique à bas seuil dans notre corps, qui ronge toutes les fonctions organiques, réduit, par exemple, la masse musculaire et accélère le processus de vieillissement. Néanmoins, nous ne recommandons pas une perte de poids délibérée chez les personnes âgées, car cela entraîne également une perte de masse musculaire. Il est préférable de passer à une alimentation saine. Il s’agit d’un régime méditerranéen riche en légumes, en poisson, en yaourts, en produits céréaliers complets sains et en protéines de source végétarienne et pauvre en viande rouge.
Comment notre attitude face à la vie influe-t-elle sur le processus de vieillissement?
L’attitude face à la vie est centrale. L’équipe de la Harvard Medical School a identifié plusieurs caractéristiques qui distinguent les personnes qui restent actives et en bonne santé plus longtemps. Cela inclut l’échange avec d’autres personnes, être socialement actif, être reconnaissant, participer à la vie, être attentif aux autres et à soi-même, et aussi la spiritualité. Et, très important, la disposition à apprendre de nouvelles choses.
Recherche de bénévoles de plus de 75 ans
L’étude STRONG vise à déterminer si la protéine de lactosérum peut réduire le risque de chutes et améliorer la force musculaire. Pour participer à l’étude STRONG, on recherche à Bâle et à Zurich des femmes et des hommes de 75 ans et plus qui se sentent peu sûrs d’eux sur leurs jambes ou qui ont déjà fait une chute. L’étude est coordonnée par le Centre Âge et Mobilité de l’Université de Zurich, sous la direction de Heike A. Bischoff-Ferrari. Informations: 044 417 10 76, cornelia.dormann-fritz@zuerich.ch
Une chute, un accident ou une opération peuvent accélérer processus de vieillissement. Cela peut-il être évité?
Vous évoquez ici la résilience physique. C’est une caractéristique importante des personnes qui ralentit le processus de vieillissement via des facteurs de mode de vie sains. On augmente ainsi la probabilité de surmonter des stress de santé, comme une opération pour une fracture de la hanche, sans restrictions durables. Il ne s’agit toutefois pas de supprimer la fragilité à un âge avancé, mais de la retarder. La médecine d’aujourd’hui a réussi à prolonger l’espérance de vie, mais jusqu’à présent pas la durée de vie saine et active. La médecine de demain doit mettre l’accent sur la prévention ou le ralentissement du processus de vieillissement.
Grâce à ses éditions spéciales thématiques en supplément à la Tribune de Genève, le journal propose régulièrement à ses lecteurs une exploration de sujets variés.